seul subsiste un tronc pourri
enraciné sur une terre
où règne l’uniformité
triste chicot
qui sait toujours d’où il vient
mais n’a plus nulle part où aller
la vie qu’il aspire encore
s’évapore par ses blessures béantes
une odeur de bois frais s’échappe des grumes
comme un encens humide
comme une odeur de paix
après un sacrifice sauvage
après cet instant du crac
son corps démantelé gît
sa majesté déchue
enchevêtrée lourde
attend le fer des outils
désormais
le soleil embrasse à pleine lumière
la belle au jardin
agenouilllée pour une
longue prière annuelle
sa main fouille la terre
elle cherche les soucis sans tracas
elle chante ses fleurs ses feuillages
elle veut des fèves des salades
des tomates qu’elle servira
triomphante et joyeuse
au soir d’une rude journée
de jour en jour ainsi
nos certitudes
bien qu’elles occupassent
tout l’espace mental
finissent par tomber
surtout quand il y a en leur centre
une pourriture qui les fragilise
or cela n’est pas du tout la fin de tout
on peut toujours postuler qu’après tout
il y a encore tout un univers à occuper
il y a encore à espérer
l’espérance cependant se trouve
en se mettant au niveau du sol
en se salissant les mains
en regardant croître du rien au tout
en y goûtant déjà
même si ce n’est pas encore abouti
et ainsi de jour en jour